Comment être chanceux

Traduit de l’anglais par Taureau Amiral

PeteW, l’ex-capitaine de l’équipe anglaise de la NAF et lilliputien ultra-compétitif, est très bon au blood bowl. Il y a un dicton sur FUMBBL, le célèbre site Web de blood bowl : « Ne jouez pas contre PeteW le dimanche. » En effet, PeteW a la réputation d’être chanceux et, comme tout bon chrétien, l’esprit rationnel des coachs de blood bowl craint que PeteW soit encore plus chanceux le dimanche.

Il n’est pas le seul. Certains coachs sont perçus, jugés et mystifiés comme chanceux. Pourtant, il est clair qu’ils ne le sont pas plus que les autres. En tant qu’être humain moderne je ne crois pas au hoodoo, à l’horoscope, aux lutins, au Père Noël, ou aux retombées économiques. Je suis un adulte. Ça ne me dérange même pas si quelqu’un d’autre touche à mes dés. En vérité, ces coachs ne sont pas simplement chanceux, n’est-ce pas ? Je veux dire, ça n’est pas vraiment le cas. Ou plutôt, est-ce que ça l’est ?

La mauvaise nouvelle est que la réponse est, logiquement, non. C’est une question de perception. La bonne nouvelle est que ça signifie qu’être chanceux peut s’apprendre.

Avoir de LA CHANCE EST IMPORTANT

Si on me demande quel est mon plan pour un match donné, je réponds généralement la même chose : « Plan A : être plus chanceux que l’autre. » Je plaisante juste à moitié. Le coach aux bons dés est généralement celui qui est le mieux placé pour gagner. Hors, on n’a aucun contrôle sur les résultats de nos dés, seulement sur nos choix de jeux. Néanmoins, de bons dés sont essentiels au succès.

Dans tout jeu où il y a du hasard, l’un des adversaires aura plus de chance que l’autre. C’est un fait indiscutable. Même si le total net de la chance était de zéro, c’est plutôt la façon dont elle est répartie qui importe. Pas seulement à qui, mais aussi quand et à propos de quoi. Vous pouvez avoir roulé exactement les mêmes résultats de dés que votre adversaire, mais si les vôtres sont arrivés aux bons moments, et les siens aux mauvais moments, la chance ne sera pas la même. La chance n’est pas qu’une question de statistiques malgré ce qu’en disent les streamers sur Twitch, désespérément à la recherche de contenus et dévorant les logs de dés comme si la vérité et la justice s’y cachaient. La chance a un timing et un impact. La chance a un moral et un ressenti. La chance a le flair pour ce qui est dramatique.

Tout le monde se fiche que vous ayez réussi six jets à 2+ dans un tour. Mais si vous réussissez un seul jet à 5+, tous les coachs vont en parler. Pourtant, les probabilités brutes de succès sont à peu près les mêmes.

À chaque match, l’un des deux coachs en présence est le plus malchanceux. À chaque jour, un coach a les pires dés du blood bowl. À chaque semaine, un coach est le bâtard désigné d’Énéfel. Cette année, un pauvre bougre est à l’extrémité inférieure du spectre de la chance et a les pires dés du monde. Pourtant, en moyenne, la chance devrait être plus ou moins similaire pour chacun d’entre nous, et plus la taille de l’échantillon est grande, plus elle devrait tendre vers une normale de bons et de mauvais résultats. Le coach qui a eu aujourd’hui les pires dés de toute la communauté du blood bowl n’aura probablement pas les mêmes résultats de dés demain. Ça se pourrait, mais ça ne sera probablement pas le cas.

Nous devons donc accepter que la chance existe et qu’elle fait partie du jeu, mais que nous ne pouvons pas la contrôler. C’est parce qu’elle devrait nous être neutre au fil du temps que nous élaborons des tactiques et des stratégies et que nous cherchons à jouer de manière à minimiser son impact et à atténuer ses sautes d’humeur. C’est correct et normal. C’est aussi ce qu’un coach devrait faire lorsqu’il essaie d’exceller au blood bowl.

POURQUOI ÊTRE CHANCEUX

Mais si la chance fait partie du jeu, ne devrait-on pas y réfléchir au moins un peu ? Au-delà des simples « oh, j’ai manqué de bol ! », « pourquoi mes dés m’en veulent ? », et « je suis jamais aussi chanceux que l’autre ! ». Ne devrions-nous pas, en plus d’essayer de limiter la malchance, essayer d’avoir de la chance ? D’aller à sa rencontre ? De la tenter ?

Le résultat attendu de chaque engagement est, réalistement et statistiquement, que l’équipe qui reçoit le ballon marque le touché. Par nos choix d’actions, notre utilisation des compétences, et notre connaissance des mathématiques, nous essayons d’imposer ou de modifier ce résultat attendu. Mais lors de certains matchs, engagements, tours de jeu et roulements de dés, nous partons avec une longueur de retard. Nous avons même des constructions d’équipe spécialisées là-dedans; les constructions de type high roller dédiées aux événements NAF, et même parfois jouées en ligue saisonnière ou perpétuelle.

Au blood bowl, si tout se passe comme prévu, c’est Tic-Tac-Toe. C’est une impasse. Le jeu d’échecs évite cet inconvénient par la complexité, le blood bowl l’évite en introduisant du hasard. C’est ainsi qu’une victoire facile peut s’obtenir lors d’un engagement où l’équipe adverse s’effondre tout bonnement. Vous récupérez ensuite le ballon et le pointage est porté à 2-0. Mais généralement, aussi bien pour remporter un match que pour mettre la main sur un ballon, il faut davantage de chance que ça, ce qui mène à une mentalité de high roller lors d’une action, d’un tour de jeu ou d’un engagement.

Au tennis, les points gagnés sont souvent catégorisés en « aces », « fautes directes » et « fautes provoquée ». Au blood bowl, je vois trop souvent des coachs, même de haut niveau, se contenter de marquer le porteur de ballon en espérant qu’il reste en contact jusqu’au prochain tour, ou que le tour de jeu adverse se termine en turnover sur une esquive ou un blitz raté suite à un effort pour dégager le ballon. En réalité, un trop grand nombre de ces tentatives sont de gigantesques coups d’épée dans l’eau; le 1 sur 9 que le blitz n’enlève pas le joueur marquant le porteur, le 1 sur 9 ou le 1 sur 36 que l’esquive échoue … Et ça c’est sans tenir compte du nombre de fois où de meilleures probabilités ont été offertes – et refusées – pour plutôt se mettre en position d’attendre ces turnovers peu probables.

Gardons ça simple. Disons que nous avons refusé une esquive à 5+ et un dé de blocage nécessitant un POW ou un Défenseur Bousculé (essentiellement un autre 5+). Eh bien, ça semble être des probabilités plutôt faibles, n’est-ce pas ? Alors mieux vaut ne pas tenter le coup et plutôt leur faire lancer quelques dés ? Mais attendez, ce 5+ 5+ est exactement la même chose que le 1 sur 9 de rater une esquive que nous espérions leur imposer, et aussi de bien meilleures chances que le 1 sur 36 que nous prions qu’ils échouent quand nous choisissons plutôt de marquer le porteur de ballon.

Essentiellement, nous préférons voir l’autre coach échouer plutôt que de risquer d’échouer nous-mêmes. Nous, les humains, avons une aversion au risque. C’est un bon trait de survie, et le blood bowl nous apprend à craindre le risque, à éviter de rouler les dés et à jouer ce qui est sûr. Parfois, il est aussi beaucoup plus facile de penser « oh, il a roulé de bons dés » alors qu’en fait, nous nous sommes juste dégonflés devant les probabilités. En quelque sorte, pour protéger notre égo, nous préférons nous dire que l’adversaire a bien roulé plutôt que de nous voir échouer. Mais n’est-ce pas une excuse trop souvent utilisée pour justifier le fait que le jet de dés était plutôt facile ? Ou que nous avons refusé une victoire probable au profit d’une victoire moins probable ?

Il est peut-être temps d’attacher notre tuque et de tenter notre chance.

QUAND Être chanceux

Il est clair qu’il n’est pas sage de coacher avec un abandon total. Malgré le cas limite décrit ci-dessus, il est logique que nous jouions un style de blood bowl raisonnable et sans risques, style si cher aux meilleurs coachs : l’approche mathématique la moins sujette au hasard. Mais est-ce bien raisonnable ?

Dans certains matchs, nous serons toujours désavantagés en raison de la composition de notre équipe, des talents respectifs des coachs, de la force des races en présence, peu importe. Et dès le coup d’envoi de ces matchs, nous devrions chercher ces moments où être chanceux pourrait changer la donne.

Même lors des matchs où nous partons favoris, il peut y avoir des moments où nous prenons du retard dans les points ou les sorties, et où l’issue devient moins certaine. Être capable de repérer ces moments et ces changements dans l’état de la situation sera toujours un facteur clé à un haut niveau de coaching et c’est donc ici qu’intervient la chance. Un coach doit alors se poser des questions. « À quel point est-ce que la situation s’est détériorée ? » « Qu’est-ce qu’il me reste comme atout ? » Ces questions dovient parfois être suivies d’une décision difficile : « Bon, je vais devoir tenter ma chance. »

Il est difficile d’être précis, mais un exemple classique est survenu lors d’un match du BB2 Chalice. Deux coachs très connus et respectés se sont affrontés et ont tous deux négligé un Zombie de force 4 situé à l’arrière du jeu et marqué par un seul Beastman incompétent. Le ballon était à 3 cases de distance, tenu par un Beastman avec la compétence Blocage, mais sans Esquive, à une case de la ligne de touche, sous la pluie. Une esquive à 4+ pour un blitz à 2 dés avec de bonnes chances de rebond et des bonus liés à la pluie.

Ce qui était beau dans tout ça, c’est que ça ne modifiait rien au plan de l’équipe Morte-Vivante. Elle aurait pu positionner ses murs anti-elfes, ses pièges à Frénésie et ses couvertures à Glissade Contrôlée, et avoir encore deux ou trois joueurs de libres pour, en cas de blitz réussi du Zombie, récupérer le ballon si sa dispersion était favorable, et tout ça sans sacrifier sa position défensive.

L’analyse exacte des risques varie en fonction des races en présence et de l’état de la situation, mais ce cas illustre parfaitement certains des facteurs clés pour risquer d’avoir de la chance. Il n’y a aucun intérêt à tenter sa chance s’il n’y a aucune possibilités de récupérer le ballon, ou si ça affaiblit le positionnement de l’équipe et expose des joueurs clés. Si ça n’est pas sensé de parier sur une main déjà gagnante, l’inverse est vrai; s’accrocher à une main perdante est un pari risqué. Plus le match avance, plus la défaite devient certaine, et plus on voit des coachs prendre des chances qui étaient possibles plus tôt dans l’engagement mais qui ont été refusées, ou qui étaient peut-être même meilleures plus tôt mais qui ont été refusées dans l’espoir qu’une meilleure chance se matérialise.

Bien sûr, certains jeux exigent que vous attaquiez au bon moment, mais trop souvent, les coachs attendent et prennent une seule chance alors qu’une meilleure évaluation de la situation plus tôt dans le match aurait pu leur permettre trois de ces opportunités, triplant ainsi leurs chances de succès.

Il existe une vieille blague dans laquelle un homme pieux prie tous les soirs pendant 40 ans pour gagner à la loterie. Il mène une bonne vie, fait tout ce que l’Église et Dieu lui demandent, et après 40 ans, il s’écrie : « Pourquoi m’avez-vous jamais répondu, Seigneur ? Tout ce que je souhaite, c’est un petit gain à la loterie ! Pourquoi est-ce que j’ai jamais rien gagné ? » et Dieu lui répond : « Commence d’abord par acheter un ticket ! »

Alors, évidemment, continuez à chercher ces moments parfaits. Mais apprenez aussi à repérer ceux où jouer la sécurité ne suffit plus, ceux où le vent a tourné, où la dynamique a changé, et où la situation est sur le point de devenir si désespérée qu’elle ne pourra que s’envenimer. N’attendez pas à la dernière minute pour tenter un jeu désespéré, tentez votre chance deux tours avant. Misez gros dès le début. Achetez un ticket.

COMMENT ÊTRE CHANCEUX

« O.K., allez-vous me dire, je suis maintenant prêt à risquer la défaite pour risquer la victoire sur un seul pile-ou-face. »

Tant mieux pour vous. Mais on ne peut pas soudainement décider d’être plus chanceux et, du jour au lendemain, tout fonctionne pour le mieux. Il y a du travail à faire. Comme toujours, non ? Eh bien, oui. Vous allez devoir ramer.

Dans une citation largement répétée et diversement attribuée, mais qui pour moi a été dite par Alex The Hurricane Higgins : « Plus je rame et plus j’ai de la chance.* »

* Traduction très libre de Taureau Amiral

Les mathématiques sont à la base de toute chance, autant les succès que les échecs. La plupart des humains ne sont pas très doués pour les maths, ça n’est pas mon cas, et ça n’est probablement pas le vôtre non plus. Heureusement, les mathématiques du blood bowl sont d’une simplicité effarante. Il n’y a pas de grands nombres à calculer, il n’y a qu’une petite quantité de dés en présence, et les résultats sont tout simples à interpréter.

Un blocage à 2 dés couche généralement le joueur ? Vous êtes satisfait de ça ? Oui ? Bien. Vous avez raison.

Les chances de coucher un joueur avec 2 dés de blocage, en supposant que son agresseur et lui aient la compétence Blocage – ou pas du tout – est de 20/36, soit 55,5%. Les chances sont bonnes et le succès est probable. Mais est-ce que vous traverseriez un pont qui a 55% de chances de s’effondrer sous votre poids ? Probablement pas. Pourtant, nous voyons sans cesse des coachs construire leur tour de jeu autour de la certitude que ce blocage à 2 dés couchera le joueur.

Rappelez-vous l’exemple précédent d’une esquive à 5+ dans une cage, puis d’un 5+ pour faire sauter le ballon ? Tout ça semblait très improbable, et ça peut paraître une bonne idée seulement en la comparant à l’espoir de causer un turnover sur un 1 sur 9 ou un 1 sur 36.

Mais que se passe-t-il si le joueur esquivant dans la cage a la compétence Esquive ? Alors ce 5+ est, devinez quoi ? 55,5%, ou 20/36 chances de fonctionner, tout comme le blocage à 2 dés que nous jugions probable de réussir. Le 5+ pour faire sauter le ballon ? Eh bien, si nous le relançons, nous pouvons avoir un autre 55% de chances de succès. Si on tente les deux, notre 1 sur 9 devient 30,9 % de chances de réussite. Il s’agit presque d’une chance sur trois, et si vous tentez de le faire trois fois au cours d’un engagement, vous avez 67 % de chances de réussite.

De même, le fléau de la plupart des coachs nains, dans un format NAF du moins, est un Wardancer sautant dans votre cage et roulant un « 2 dés contre » avec succès. L’ignoble saleté. Bon, je suis sûr que nous sommes tous d’accord pour dire que ça ne devrait pas être permis, que les coachs qui font de telles choses sont des bêtes inférieures et que tous les Wardancers devraient être sauvagement piétinés au visage. Mais est-ce que ça requiert réellement tant de chance que ça ?

2 dés contre, avec la compétence Blocage contre pas de Blocage, c’est 1 chance sur 4 de réussite, soit 25%. Mais si vous y ajoutez une relance, vous obtenez 7/16 ou 43,75%. Il n’est pas nécessaire d’en rouler beaucoup pour que le résultat chanceux se manifeste, non pas sur un seul jet de dés, mais sur l’ensemble d’un engagement. C’est pourquoi le coach italien et légendairement agressif, Spartako, coache aussi agressivement ses Elfes Sylvains. Se battre à fond pour le ballon à chaque tour de jeu peut fonctionner, et si les adversaires ne sont pas prêts à ça, ça peut être terrifiant.

Même en choisissant la compétence Blocage sur votre porteur de ballon, et en le cachant dans une cage de compétences Garde, vous n’êtes pas en sécurité. Bien sûr, réussir un « 2 dés contre » versus la compétence Blocage est peu probable. 11% seulement et 21% avec une relance, mais roulez-en trois dans un engagement et vous avez soudainement 50,7% de chances que l’un de ces jets de dés fonctionne.

OK, OK, assez de maths. Qu’est-ce que tout ça signifie ?

CE QUE ça SIGNIFIE

Si vous voulez être chanceux, vous devez étudier les maths du blood bowl, et plus particulièrement les actions qui ne sont pas, individuellement ou cumulativement, aussi malchanceuses que ce que les coachs pensent. Vous devez bien lire le jeu et reconnaitre quand de telles opportunités se présentent, et quand il faut les saisir. Vous devez aussi être persévérant car la chance ne survient pas à tous les roulements de dés. Mais surtout, vous devez prendre les moyens d’être plus chanceux. Pour y arriver, vous ne devez pas toujours jouer ce qui est sûr et plutôt risquer le désastre pour viser l’excellence. Vous devez accepter de parfois aller à la quête d’un « six » sur votre dé si votre alternative est d’espérer que votre adversaire échoue un 1 sur 9. Et ensuite, vous aurez juste besoin d’encore un peu plus de chance.


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